Du dialogue en philosophie

Je sévis encore un peu dans cette section ^^

Personnellement j'aime beaucoup pratiquer la philosophie sous forme dialoguée, que ce soit à lire ou à parler.
On pense en premier à Platon, évidemment.
Mais il n'est pas le seul :

Sénèque le stoïcien et Plotin le néo-platonicien écrivent sous forme dialoguée (bien que sans interlocuteurs).

Diderot écrit des dialogues, dans lesquels surgissent de fameux paradoxes. Les dialogues de Diderot sont anti-platoniciens, car ils ne tranchent pas vraiment. Lire le Paradoxe du comédien ou Jacques le fataliste pour avoir un aperçu.

La philosophie dans le boudoir est une oeuvre composée de cinq dialogues, de Sade; dans laquelle les personnages mettent en pratique leurs préceptes philosophiques.

Les Nouveaux essais sur l'entendement humain de Leibniz sont sous forme dialoguée : un personnage défend les thèses de Locke et un autre soutient celles de Leibniz lui-même.

Les Trois dialogues entre Hylas et Philonous, de Berkeley, opposent un matérialiste à un spiritualiste (qui représente Berkeley). C'est proche de la forme platonicienne.

Dans la deuxième partie de La destination de l'homme, de Fichte, le Moi dialogue avec l'Esprit. Ce dialogue est un écho de celui que j'ai cité juste au-dessus.

Il y a aussi les Conversations chrétiennes de Malebranche, etc.

L'inconvénient des dialogues de type platoniciens, c'est qu'ils peuvent conduire à un scepticisme. Certains dialogues de Platon se terminent sans que les interlocuteurs aient pu se mettre d'accord sur la réponse à la question du départ (par exemple : Qu'est-ce que la science). La forme de la dissertation évite mieux ce problème, voir Aristote par exemple. Mais le dialogue est quelque chose de vivant; son lieu par excellence est l'agora grecque (Socrate, cyniques) et il permet de vivre sa philosophie et non seulement de l'écrire, de la théoriser.

L'écueil du dialogue, c'est qu'il peut rapidement se transformer en excipient réthorique destiné à démontrer la supériorité d'une idée sur une autre (ou des autres) en faisant passer un des deux interlocuteurs pour un crétin fini.
Mais sinon oui, c'est sympa, c'est clairement plus vivant qu'un traité.

quand tu parles de philosophie dialoguée, tu fais une distinction avec la dialectique?

Euh, précise de quelle dialectique tu parles...

Platon , Kant, Hegel, Marx ?

oui tu fais bien de demander, j'avais plus à l'esprit la dialectique platonicienne en fait!

La dialectique est une forme (sinon la forme dominante) de philosophie dialoguée. Mais elle n'est pas la seule, en témoigne Diderot, qui s'en éloigne complétement. Voilà

zongo tu as raison , le risque de tout dialogue est de sombrer dans la rhétorique et l'échange d'idées reçues, mais en ce cas ce n'est plus un dialogue (par dialogue j'entends quelque chose de raisonné et soumis à des "règles" philosophiques).

mais un dialogue sans consensus possible, est-il encore un dialogue pour vous?

ça dépend ; est-ce que tu considère :

-un dialogue dans lequel un consensus est impossible au départ, intrinsèquement,
-ou un dialogue qui s'achemine, dans lequel un consensus était possible, mais où il ne sera pas atteint pour telle ou telle raison ?

non le premier cas!!!!

En ce cas c'est n'est pas un dialogue (pour moi bien sûr), car suivant ce que j'ai dit au-dessus, des conditions ou règles doivent être établis, qui rendent possible un consensus (même s'il n'arrive pas).

donc j'avais bien compris, c'est dans ce cas que tu dis que c'est de la rhétorique?

la rhétorique peut être un cas de non-dialogue, mais bon la rhétorique c'est un peu plus compliqué que cela.
l'exemple basique c'est l'échange de préjugés.

Les frères Karamazov ont ils une place ici?